Il est des moments magiques dans la vie. Moments auxquels il faut être particulièrement attentif ; qu’ils soient positifs ou négatifs. Ils sont une source d’énergie vitale, ils nourrissent notre engagement au quotidien. Ils donnent une cohérence et nous rappellent le sens de notre action. Laissez-moi vous conter une anecdote.
Il y a quelques semaines, nous avons eu l’occasion de répondre à un appel d’offre sur un projet d’innovation majeur. Sensible au sujet, nous nous sommes réunis au sein d’un collectif de travail intégrant des partenaires. La déception de ne pas avoir été retenu fut à la hauteur de notre intérêt et notre motivation sur le sujet. En réalité, de volonté d’innovation il n’y avait pas de la part du commanditaire de l’appel d’offre. Juste le désir de réfléchir entre experts/acteurs du milieu sur l’avenir des territoires concernés.
Ces moments de déception peuvent vous faire perdre vos convictions au point de vouloir arrêter. Sommes-nous dans le juste lorsque nous invitons les gens à réfléchir différemment, dans un autre contexte, avec des interlocuteurs inhabituels ? Est-il possible et souhaitable d’amener des acteurs solidement ancrés dans leur écosystème, à sortir de leur zone de confort et prendre le risque d’inventer de nouvelles solutions ? Même si leur situation est confortable ?
Dionysos, l’étranger dans la ville
C’est pendant ce moment de doute que je découvre une série documentaire traitant des mythes grecs, diffusée sur Arte et intitulée « Les grands mythes – Les dieux et héros grecs ». Et parmi ceux-ci, celui de Dionysos attire mon attention par son titre : « Dionysos, l’étranger dans la ville ». Dieu errant et vagabond, il est considéré comme un marginal.
A l’instar de tous les mythes, celui de Dionysos se veut explicatif de phénomènes sociaux et fondateur d’une pratique sociale. Cette pratique sociale est celle de l’innovation, de la transformation par la marginalité comme espace de renaissance pour les sociétés humaines.
Il est, selon ses propres mots : « le plus grand défi jamais lancé à la face de l’humanité ». Aux hommes qui révèrent l’ordre, les habitudes et la rigueur, il révèle que des forces obscures et sauvages sont en chacun d’eux et qu’ils doivent apprendre à les dompter.
Pour lui, la plus grande folie est celle de vouloir une Cité parfaitement vertueuse et rationnelle. Attributs qui n’appartiennent qu’aux Dieux. La part d’imprévu et d’inattendu, qui de prime abord les dérange, doit être accueillie avec joie. C’est à ces conditions qu’ils seront libres.
Dionysos est en réalité notre guide sur le chemin étroit entre l’ordre et le chaos. Il nous aide à trouver la voie si ardue vers le nouveau, le différent en nous incitant à dépasser nos postures.
En ce sens, nous nous sentons, au sein de Grains de Sel Cie, les enfants de Dionysos. Nous invitons chacun d’entre nous à oser la liberté d’être différent, d’être autre, d’être soi-même non parce que le monde qui nous entoure le demande, mais parce que cela correspond à tracer son chemin de vie.
C’est ce que ce documentaire diffusé par Arte m’a rappelé avec force, renforçant ainsi ma conviction à m’engager. Je vous invite à trouver, parmi les mythes grecs évoqués dans cette série, celui qui vous parle et vous ancre dans vos choix.